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Education: Le Maroc enterre ses enfants dans le trou de la ségrégation

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ÉDUCATION - C'est bientôt la rentrée et c'est l'heure de sortir la calculatrice et de compter ses sous! Le temps où l'école publique avait le vent en poupe est révolu et demain, pour offrir à leurs enfants une éducation à peu près correcte, les parents - souvent impuissants et rêvant d'un Maroc avec une conscience meilleure - se saigneront pourvu que la récolte soit à la hauteur de leurs songes. Les plus "audacieux" feront les yeux doux aux missions françaises, belges, espagnoles, américaines ou encore anglaises, les implorant d'accepter leur tendre progéniture mal née.

Les moyennement nantis se tourneront vers le secteur privé - un business très juteux aujourd'hui qui exploite les lacunes d'un système éducatif plus que défaillant et complice - et miseront gros, parfois jusqu'à leurs maigres économies tout en faisant l'impasse sur une vie extérieure aux murs de leurs maisons dans l'espoir, parfois naïf, "d'acheter" cette éducation si rare et prisée dans notre pays.

Beaucoup se rendront compte, sur le tard, que le privé n'est absolument pas gage de qualité. Loin de là d'ailleurs. Rares seront ceux qui tomberont sur la perle rare, celle-là même qui fera de sa pédagogie un argument marketing... comme si la pédagogie était une faveur. Mais c'est vrai qu'ici, elle devient une exception dans une norme complexe.

Les plus pauvres, les démunis, placeront - la mort dans l'âme - leurs enfants dans des écoles publiques où leurs gamins s'entasseront par plusieurs dizaines dans des salles de cours bruyantes, insalubres, où les instituteurs - que Dieu leur vienne en aide - ne sauront sur quel pied danser ni comment faire parvenir leur enseignement à ces pauvres à l'avenir incertain... dans le meilleur des cas. Dans le pire des cas, leurs enfants quitteront les bancs de ce qu'ils qualifieront peut-être, et à juste titre, de prison et se contenteront de leurs petits acquis "bricolés" pour s'en sortir. Un peu ou pas.

Sans oublier nos enfants, absents de nos regards, que nous oublions souvent, qui traverseront - encore cette année - des kilomètres à pieds pour enfin s'écrouler de fatigue sur leurs manuels scolaires une fois arrivés à leurs lointaines destinations. Les plus tenaces s'accrocheront, les autres abandonneront ce supplice pour devenir bergers ou pour labourer des champs. D'autres encore deviendront les petites bonnes de nos grandes villes ou se marieront... très jeunes.
Aujourd'hui, l'éducation est devenue un luxe et rares sont ceux qui en ont pleinement les moyens.

Le Maroc, dans sa lancée de "débiliser" son peuple parce que sa conscience lui serait fatale, fait semblant de s'inquiéter pour ses enfants mais il n'en est rien. La preuve, depuis la vertigineuse chute de notre système éducatif, cela va de mal en pis et à part quelques promesses en l'air pour calmer les esprits révoltés et conscients de la vaste supercherie, presque rien ne change et on continue à privatiser ce secteur.

Bientôt, seuls les nantis pourront suivre le mouvement et le "reste" s'embourbera dans la médiocrité parce que son pays n'en a que faire de l'égalité des chances. Parce que oui, il faut l'intégrer, l'égalité des chances n'existe pas, et quand on est pauvre, il faut trimer doublement en espérant voir enfin une lueur, même timide, au bout de ce long tunnel plein d'embuches. Embuches semées par les mains de notre chère patrie et auxquelles il n'y a et il n'y aura que peu de "survivants".

Aujourd'hui, nous assistons - impuissants - à la disparition progressive de l'école publique au profit de l'institution privée vers laquelle le Marocain est obligé de migrer. L'Etat, dans une idéologie douteuse et lâche, se lave tous les ans davantage les mains de l'avenir de ceux qui, en principe, sont censés le construire demain. Pire, il encourage le secteur privé et lui offre les pleins pouvoirs au détriment des intérêts de son peuple condamné à l'insuffisance. L'insuffisance du Maroc qui continue dans sa lancée d'inverser les rôles: ce qui aujourd'hui devrait être une "option" est devenu une norme et la norme s'est transformée en grande poubelle à inégalités.

L'addition est salée et la note, c'est nous "les autres, enfants de personne", qui la payerons. Nous la payons déjà et nous continuons à rincer tous les jours davantage dans l'indifférence de nos élites confortablement installées dans leurs fauteuils - en cuir j'imagine - de l'incompétence.
La rentrée est dans quelques jours, nous allons devoir sortir les calculatrices tout en mesurant la profondeur de ce trou, ce trou dans lequel notre propre pays nous enterre avec une pioche. La pioche de la ségrégation.

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