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Comment l'Histoire peut nous sauver ?

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L'Histoire, cet inconnu. Un inconnu qui fait peur! Un inconnu qu'on essaie d'expliquer, de mettre en perspective et de discuter. Mais rares sont ceux qui arrivent à distinguer ses grands éléments, ses doctrines ou son développement.

Depuis Ibn Khaldûn, qui a pratiquement vu la naissance de l'Histoire critique, la pratique de l'Histoire, en tant que pratique de la réflexion, devint une conquête de la "vérité" et, en ce sens, elle est une reconquête de la Mémoire. Néanmoins, notre quotidien est mené sans presque rien comprendre des leçons du passé. La société qui nous entoure, nos mœurs, nos croyances, notre culture, nos institutions, les lois qui nous régissent, les cadres politiques auxquels nous sommes accoutumés sont le fruit des siècles qui nous ont précédés; les faits auxquels nous sommes mêlés en sont la résultante.

En effet, il n'est pas nécessaire d'aller jusqu'au Japon, pays du traditionalisme et d'innovation, pour en être frappé : les peuples les plus novateurs, ceux qui ont cru faire table rase du passé, restent malgré eux et dans tous les domaines les héritiers de leurs ancêtres. Car les révolutions ne sont que des sautes brusques de température; elles n'interrompent qu'un moment la courbe où vient s'inscrire notre développement historique.

Nécessaire à l'intelligence du présent, l'Histoire ne l'est pas moins à la santé de nos esprits. Notre passion de l'absolu a besoin d'un contrepoids, que l'Histoire vient fort à propos lui fournir.

L'Histoire ne rend pas sceptique, comme on le dit souvent, mais elle est une merveilleuse école de prudence. Aux outrances de la raison, elle oppose le barrage des faits; à ceux qui croient détenir la panacée qui guérira la société de ses maux, elle rappelle qu'avant de prescrire un traitement, il convient d'examiner attentivement le malade et de s'informer de ses antécédents.

Elle enseigne le relatif et, si l'on peut dire, le conditionnel, puisque tous les faits dont elle traite se commandent les uns les autres et réagissent les uns sur les autres. En bref, l'Histoire enseigne la vie, dans sa complexité et ses détours, puisque son domaine est précisément l'étude de tout le passé humain dans sa luxuriante diversité.


C'est peut-être de là que vient la méfiance que beaucoup manifestent l'égard de l'écriture historique. En ce début du siècle où triomphent les sciences dites "exactes" ou "dures", toute discipline non réductible en formules paraît relever de la fantaisie. Qu'on y prenne garde: à céder à ce penchant, nous irions tout droit à un raidissement de l'esprit qui le rendrait impropre aux tâches que la vie lui réserve. Une discipline sensible aux nuances n'est pas par définition étrangère à la science, elle présente une rigueur toute scientifique, quoique, à la vérité, très différente de la rigueur formelle des mathématiques. Et cette diversité même nous paraît un bien, car l'expérience prouve qu'à trop s'exercer dans l'abstrait, notre raison perd quelque chose de ses vertus. Si elle ne nous apprenait qu'à raisonner dans le concret et à faire intervenir dans nos calculs le facteur humain, l'Histoire serait déjà amplement justifiée.

La nécessité et l'intérêt de l'Histoire apparaîtraient mieux si l'on se faisait une idée plus claire du but qu'elle poursuit. Bien des livres que leurs auteurs déclarent historiques, sans qu'ils aient grand-chose de commun avec la véritable histoire, tendent à créer une confusion, dont celle-ci n'est pas responsable, mais qui jettent sur elle un fâcheux discrédit. Peut-être ne sera-t-il donc pas inutile de chercher à dissiper l'équivoque. L'objectif le plus immédiat que se propose l'Histoire est de sauver de l'oubli les faits du passé.


On sait maintenant que depuis la naissance de la "raison critique", l'Histoire s'emploie à recueillir et classer les événements de tous ordres dont les siècles passés ont été les témoins, prêtant une égale attention aux mœurs et à la civilisation, à la politique et aux conditions sociales, aux faits de guerre et aux œuvres de paix, et ne connaissant à sa curiosité d'autres bornes que celles de notre information. Car, à vouloir d'avance limiter son enquête, elle courrait le risque de laisser échapper l'essentiel. Aucun détail, aucune particularité ne sont donc écartés à priori. L'idéal étant de parvenir à une connaissance intégrale du passé, on s'en rapprochera d'autant mieux que la collecte sera plus abondante et plus variée.

In fine, Abd-ar-Rahman Ibn Khaldûn notait au milieu du 14ème siècle que l'histoire est une "discipline des plus répandues entre les nations et les races. Le vulgaire voudrait la connaître. Les rois, les dirigeants la recherchent à l'envie. Les ignorants peuvent aussi bien la comprendre que les gens instruits. En effet, l'histoire n'est, en apparence, que le récit des événements politiques, des dynasties et des circonstances du lointain passé, présenté avec élégance et relevé par des citations. Elle permet de distraire de vaste publics et de nous faire une idée des affaires humaines", cela place au cœur des débats la question de la construction du passé et son rapport avec nos temps présents.

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