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Si l'argent politique n'a pas d'odeur, il a surement une origine?

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Les élections législatives tunisiennes sont passées et la présidentielle est pour bientôt.

Un des sujets récurrents des dernières semaines a été l'argent politique. On le retrouve sous différentes dénominations: Politique, sale, corrompu.

Tout le monde en parle et tout le monde le dénonce.

Beaucoup l'ont vu mais personne n'a de vraies preuves. Quand on parle aux politiques de la chose, ils vous diront que la loi électorale est un vrai gruyère, écrite par une majorité de constituants qui pensaient clairement tirer bénéfice de telles lacunes.

L'ISIE quand à elle, se cache derrière le manque de preuves et vous avancera l'argument que son "action" ne peut être engagée qu'à posteriori du fait et uniquement avec des preuves en béton. Bien entendu, aller chercher de telles preuves n'est pas de sa responsabilité.

Et dans toutes ces tergiversations étouffées par le "Vote Utile", un fait est pratiquement passé inaperçu il y a quelques semaines, uniquement relayé par un ou deux médias électroniques.

Le 18 Septembre 2014, le Ministère de la Justice américain annonçait sur sa page Internet que conformément à la loi sur l'enregistrement des agents étrangers (Foreign Agents Registration Act FARA), une société américaine de relations publiques avait déposé une déclaration de contrat pour un nouveau client.

FARA est une loi de 1938 sur la transparence qui exige que les personnes américaines agissant en tant qu'agents d'entités étrangères dans un but politique ou quasi-politique, divulguent publiquement leur relation avec le donneur d'ordre étranger, ainsi que les activités elles mêmes, les recettes et les décaissements en faveur de ces activités.

On peut bien sur se demander quel est le rapport avec les élections en Tunisie? La société en question s'appelle Burson-Marsteller et son client, tel que cité dans la déclaration du Département de la Justice est le parti politique islamiste tunisien Ennahdha.

Dans le monde des relations publiques, Burson-Marsteller est un géant et une des plus grandes, des plus anciennes et des plus riches sociétés de communication au monde.

Elle exploite 67 bureaux en propriété exclusive et 71 bureaux affiliés dans 98 pays sur les 5 continents. Mais au-delà de ses réussites professionnelles, l'entreprise américaine traine une réputation plutôt sulfureuse.

Pour savoir qui ils sont vraiment, nous citerons Rachel Maddow la fameuse journaliste de MSNBC qui les décrits comme suit:

"Qui est Burson-Marsteller, Eh bien, quand les mercenaires de Blackwater ont tué 17 civils irakiens à Bagdad en 2007, ils ont appelé Burson-Marsteller. Quand il y eu la catastrophe nucléaire de Three Mile Island, Bobcock & Wilcox, qui a construit l'usine, a appelé Burson-Marsteller."


Après la catastrophe chimique de Bhopal qui a tué des milliers de personnes en Inde, Union Carbide a appelé Burson-Marsteller. A la veille de sa chute, le dictateur roumain, Nicolae Ceausescu a appelé Burson-Marsteller. Le gouvernement d'Arabie saoudite a signé un contrat avec eux, trois jours après le 11 Septembre.

"La junte militaire qui a renversé le gouvernement de l'Argentine en 1976, les généraux ont appelé Burson-Marsteller. Le gouvernement de l'Indonésie, accusé de génocide au Timor oriental, Burson-Marsteller.


"Le gouvernement du Nigeria, accusé de génocide au Biafra, Burson-Marsteller. Philip Morris accusé dans les grands procès contre l'industrie du tabac, Burson-Marsteller. Procès des implants mammaires en silicone qui explosent, Burson-Marsteller. Quand le gouvernement de Colombie a essayé de faire oublier les assassinats de syndicalistes au moment des négociations sur les accords de libre-échange avec les USA, ils ont appelé Burson-Marsteller.

Plus récemment, ils ont représenté les compagnies agro-alimentaires européennes qui ont vendu de la viande de cheval en la faisant passer pour de la viande de bœuf et Facebook dans sa campagne de dénigrement de Google.

Ils sont très proches des néo-conservateurs même si leur PDG Mark Penn a été le 1er conseiller d'Hillary Clinton lors de sa campagne contre Barak Obama en 2008. Dans la profession, on dit que "Quand le diable a besoin de relations publiques, il a le numéro de Burson-Marsteller dans ses numéros abrégés" (When evil needs public relations, evil has Burson-Marsteller on speed dial)

Mais revenons au contrat avec Ennahdha enregistré le 18 Septembre dernier sous le numéro 6227.

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Il stipule qu'il a été signé par Mr Ifhat Smith, directeur executif du bureau d'Ennahdha à Londres et domicilié au 55 Bryanston St, Marble Arch Tower, à Londres (dans le quartier chic de Hyde Park à quelques mètres de Speaker's Corner).

Burson-Marsteller était représenté dans le contrat par sa directrice générale Sharon Balkam.

Le document en question peut être consulté sur l'adresse suivante et son objet est de " Fournir au Parti Ennahdha un soutien au niveau des médias et la sensibilisation des décideurs en vu des élections à venir ".

En gros, faire du lobbying auprès des autorités américaines, du Congrès et des médias les plus influents.

Si le document FARA ne donne aucune information sur le montant de la prestation, il dit que "les frais et dépenses seront" déterminées à une date ultérieure ". La loi américaine n'obligeant les parties à une déclaration finale que dans l'année fiscale à venir, c'est-à-dire à partir d'Octobre 2015.

Nos E-mails aux deux parties sont restés sans réponse. Afin d'avoir une idée même approximative du montant et de la durée du contrat, nous avons contacté quatre sources différentes opérant dans le domaine de la communication et des relations publiques à Washington et les évaluations concordantes parle d'un montant d'un million et demi de Dollars pour une mission de 45 jours.

Un autre de nos contacts, habitué aux hautes sphères de la finance mondiale a eu la réflexion suivante: " These guys get paid Serious bucks ! (Ces gars lç sont payés avec de l'argent lourd !). Dans l'argot américain "Serious" est quelques étages au dessus de "Big".

Si toutes ces informations publiques, recueillies suite à des recherches sur Internet et quelques E-mails n'intéressent pas l'ISIE car la loi électorale ne lui donne aucune obligation de préemption, il existe d'autres lois en Tunisie, notamment la loi sur le contrôle des changes qui devrait faire réagir l'Etat Tunisien, au moins au niveau du ministère des finances et de la Banque Centrale, car le Ministère Publique semble occupé à d'autres choses que l'argent politique.

On se souvient qu'à la veille des élections de 2011, à la question du financement d'Ennahdha, son président Rached Ghannouchi avait dit qu'il venait exclusivement de ses adhérents. Quelle est donc la part en Dollars de ces cotisations? Et surtout avec quelle autorisation de transfert de la BCT Burston-Masteller a-t-elle été payée?

Et si ce contrat a été payé directement de l'étranger par quelques "amis et sympathisants", qui sont-ils?

Car la loi électorale de l'ISIE est très claire sur le sujet et elle criminalise tout financement étranger, surtout s'il provient d'un état!

Si l'on accepte que l'argent politique n'as pas d'odeur, être curieux et poser les bonnes questions permettra peut être de lui trouver une origine. A moins que l'on ne veuille pas sortir des débats généralistes sur les plateaux de télévision.



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