Quantcast
Channel: Maghreb
Viewing all articles
Browse latest Browse all 4626

Dialogue économique: La seule logique du moindre mal!

$
0
0
"En politique le choix est rarement entre le bien et le mal, mais entre le pire et le moindre mal. Il faut estimer comme un bien le moindre mal".

Le gouvernement semble avoir fait sienne cette maxime d'A. Gramsci dans son célèbre Machiavel. Pour paraphraser ce propos dans le contexte de crise des finances publiques et d'aggravation des déficits intérieurs (compensation, retraites, entreprises publiques) comme extérieurs (balance courante, service de la dette, transferts divers), force est d'admettre que le fonctionnement de notre modèle de croissance est dans l'impasse, et qu'il faudrait donc lui trouver une issue. Mais laquelle?

Première réponse spontanée: Sauver ce qui peut l'être par la fuite en avant

Les divers gouvernements qui se sont succédés, n'ont eu de cesse de tenter de prolonger sa survie, sans vouloir à aucun moment remettre en cause les ressorts mêmes de sa dynamique, ressorts qui ont fini par se gripper, s'essouffler, pour finir par tomber en panne, sous nos yeux: effets conjoncturels amplifiés d'une crise plus globale.

Nul besoin de céder à l'énumération d'indicateurs qui continue à faire office d'explication. La mystique du chiffre est toujours vivace en lieu et place de la réflexion.

Un commerce extérieur structurellement déséquilibré où les exportations courent désespérément derrière des importations toujours plus libres et plus nombreuses. Mais aussi toujours plus concurrentielles de productions nationales qui ne trouvent pas l'espace suffisant à leur épanouissement. On peut désormais tout acheter, en provenance de l'étranger sans restrictions d'aucune sorte (sauf le prix), tous les produits possibles au point d'observer le basculement frénétique de larges fractions de la population dans un consumérisme forcené, certes différencié, sélection par l'argent oblige. Mais une dérive incontrôlée outrageusement coûteuse! Devise-or!

Un modèle qui a fonctionné en boucle, par un flux continu de devises (endettement et capitaux étrangers) couvrant le déficit courant extérieur et le besoin de financement de l'activité. Un argent frais toujours plus canalisé vers l'investissement privé censé compenser le désengagement de l'Etat, par sa propre "création" d'emplois et de "surplus" de devises. On sait ce qui est advenu. Mais un mythe qui a la peau dure!

D'où la fuite en avant observée ces dernières années, consistant à rembourser les anciens emprunts par de nouveaux, solution qui a fini par s'emballer, de nouveaux crédits venant combler les déficits, voire plus récemment payer le fonctionnement même de l'Etat. Une perpétuation circulaire qui bloque faute de disponibilité d'un volant suffisant de devises (tourisme, phosphates). La reproduction du cycle est désormais compromise si des ajustements ne sont pas trouvés. Il faut donc trouver autre chose!
Seconde réponse avancée: Conduire des réformes. Mais lesquelles?

Une démarche séquentielle est proposée. Procéder d'abord par des mesures immédiates mais douloureuses, puis enclencher de profonds ajustements qui autoriseraient le retour à une croissance forte. Voila le schéma en cours... d'une orthodoxie exemplaire.

On se situe bien dans l'axiomatique gramscienne d'accepter "un moindre mal pour un bien" mais qui ne trouve toute sa pertinence et toute son efficacité que si et seulement si un autre postulat est activé: "Contenter le peuple et ménager les grands, voilà la maxime de ceux qui savent gouverner". En termes actualisés, s'atteler à retrouver des marges de manœuvre dont le nœud gordien s'articule autour de la seule logique de compression des dépenses et d'économies de devises: Réduire les subventions, diminuer les déficits publics par le gel des salaires et des emplois. Une potion amère même si des précautions oratoires sont prises. Les couches populaires et défavorisées seraient épargnées par ces sacrifices. Mais, à coup sûr, un cocktail explosif qui sera supporté par la masse des ménages et des couches moyennes. Couches dont on ne sait toujours pas précisément où elles commencent et où elles finissent, sachant que nombre d'entre elles ont vu leur pouvoir d'achat laminé et leur position sociale précarisée.

Etrangeté: L'élite intellectuelle semble se résigner et avoir perdu tout sens critique

L'équité effective devant le traitement de choc qui s'annonce semble reléguée au second plan. Traitement qui, dit en passant, épargne "les grands" par les subtilités du code et des barèmes des impôts (IRPP), et préserve pour l'essentiel la sacro-sainte compétitivité des entreprises (réduction du taux d'IS, maintien des niches fiscales).

Alors on semble s'acheminer, d'autres pistes n'ayant été ni explorées ni exploitées, vers une politique d'austérité qui ne veut pas dire son nom, et à laquelle on substitue assez cyniquement le terme de "rationalisation", "d'efforts partagés".

Il n'y a toujours pas de véritable volonté de changer de cap. Pas l'ombre d'annonces d'un possible changement de paradigme. Pas même la remise en cause de ce qui a longtemps été considéré comme un instrument de développement, "la politique d'endettement", mais qui se transforme en carcan de toute nouvelle velléité d'un modèle plus juste, plus viable, plus soutenable. Pas le début d'un propos sur la transformation de l'assise financière de l'Etat, par une refonte globale de l'assiette fiscale vers un impôt citoyen et démocratique, seul véritable levier du changement.

Mais ce qui guette ce gouvernement, c'est une autre maxime d'A. Gramsci, pleine de menaces:

"Rien n'est aussi désespérant que de ne pas trouver une nouvelle raison d'espérer... même s'il est vrai aussi que deux mobiles font agir les hommes, la peur et la nouveauté". Resterait à conclure avec cet inventeur avant l'heure de la science politique (politologue, dirait-on aujourd'hui) que ce dernier gouvernement de la transition joue abusivement sur la peur, sans chercher à se donner les moyens de la nouveauté.

A propos et pour ceux qui continueraient à avoir peur d'une possible cessation des paiements extérieurs: les prêts arrivent. L'illusion savamment entretenue d'une crise majeure de liquidité s'estompe, comme le mirage quand on s'en rapproche.

Mais alors, à quand le souffle nouveau?

Retrouvez les blogs du HuffPost Maghreb sur notre page Facebook.

Viewing all articles
Browse latest Browse all 4626

Trending Articles



<script src="https://jsc.adskeeper.com/r/s/rssing.com.1596347.js" async> </script>