"Akher Wahed Fina" (The Last of Us), Tanit d'or de la meilleure première oeuvre aux JCC et Lion du futur à la Mostra de Venise, long métrage de Alaeddine Slim, connaît enfin une sortie printanière sur nos écrans, après une première, fugitive mais remarquée, lors des dernières Journées cinématographiques de Carthage . Ce film doit beaucoup aux talents conjugués de son scénariste-réalisateur, dont c'est là le premier long-métrage, de ses producteurs (Exit Prod., Inside Prod.,Madbox Studios et SVP) qui ont misé sur un film ô combien éloigné de nos habitudes de spectateurs, de son couple de comédiens Jawher Soudani et Fathi Akkari et de son directeur photo Amine Messaâdi.
Ce film fera indubitablement date dans l'Histoire du cinéma tunisien en nous conduisant, d'une manière sensible et intelligente, hors des sentiers battus en nous proposant un spectacle riche et inattendu.
L'histoire qu'il raconte est toute simple et paraît trompeuse, dans la mesure où elle s'inscrit dans une thématique qui commence à devenir galvaudée sur nos écrans, celle de la "harqa", cette émigration clandestine qui a fait tant de tragédies depuis la Révolution; mais la ressemblance s'arrête là en se limitant à ce qui fonctionne en somme comme motif : après une difficile traversée du désert, un jeune Africain se retrouve dans une ville du littoral méditerranéen (on reconnaît Tunis et sa banlieue sud mais la portée universelle du film nous le fait vite oublier) qu'il finit pas quitter sur une barque volée ; suivent le naufrage et le débarquement sur ce qui ressemble à une île où il rencontre un étrange Robinson qui l'initiera à une vie nouvelle dans laquelle, par cycles successifs, il fait différentes rencontres (le vieil homme, le loup, la lumière...) qui le mèneront progressivement vers une forme de symbiose avec la Nature-Mère.
Si The Last of Us réfère, cinématographiquement, à quelques grands noms du cinéma américain, il s'inscrit, à mon sens, bon gré mal gré, dans la tradition cinématographique des robinsonnades (citons en particulier les remarquables Aventures de Robinson Crusoé (1954) de Luis Bunuel et le Robinson Crusoé du soviétique Stanislav Govorukin (1973)) avec une reprise des différents motifs qui en constituent la structure narrative : naufrage, débarquement, rencontre Vendredi-Robinson, découverte de l'empreinte, etc.; toutefois, ces constituants sont très originalement déclinés, voire inversés dans le film : l'un des atouts du film c'est qu'il permet au spectateur de faire en toute liberté sa propre lecture de l'histoire, favorisé en cela par l'absence intégrale de dialogue, ce qui laisse du coup la voie libre à une bande -son remarquable ; ainsi l'on peut interpréter, en nous référant à la construction normative de la robinsonnade, le couple de personnages comme un couple initiatique où c'est Vendredi le naufragé qui rencontre Robinson et que c'est ce dernier qui l'initie aux mystères de la Nature, un peu à la manière du Vendredi de Tournier mais sans violence aucune.
Comme dans tout récit initiatique, le récit devient ainsi symbolique en procédant par cycles d'apprentissage où le végétal (les forêts du nord merveilleusement filmés par la caméra d'Amine Messaâdi) et l'animal (le loup-chacal dont le hurlement provoque l'excitation puis la quête du vieille homme, et que le naufragé finit par rencontrer endormi ou mort) jouent un rôle déterminant dans la quête. L'un des paliers élevés dans cette recherche est la rencontre de la lumière (qu'on peut prendre pour une représentation lunaire) dont on ne sait si elle suit ou si elle guide le naufragé. Le film , de ce point de vue, ménage un grand nombre de pistes de lecture et peut , de la sorte, intéresser différents publics, de l'intellectuel exigeant à l'enfant (je pense que The Last of Us est un film qui peut être projeté à un public de jeunes spectateurs et ce n'est pas là l'un de ses moindres mérites) en passant par le spectateur curieux de nouveautés.
"Akher Wahed Fina" est enfin un film thématiquement différent, même s'il s'articule sur les préoccupations des jeunes réalisateurs tunisiens ; il propose un produit de qualité, avec de très belles images, une bande-son intelligente, une narration originale; bref, il mérite qu'on s'y arrête et qu'on lui accorde une attention digne de sa valeur. C'est un film atypique et insolite, et c'est une excellente chose.
Ce film fera indubitablement date dans l'Histoire du cinéma tunisien en nous conduisant, d'une manière sensible et intelligente, hors des sentiers battus en nous proposant un spectacle riche et inattendu.
L'histoire qu'il raconte est toute simple et paraît trompeuse, dans la mesure où elle s'inscrit dans une thématique qui commence à devenir galvaudée sur nos écrans, celle de la "harqa", cette émigration clandestine qui a fait tant de tragédies depuis la Révolution; mais la ressemblance s'arrête là en se limitant à ce qui fonctionne en somme comme motif : après une difficile traversée du désert, un jeune Africain se retrouve dans une ville du littoral méditerranéen (on reconnaît Tunis et sa banlieue sud mais la portée universelle du film nous le fait vite oublier) qu'il finit pas quitter sur une barque volée ; suivent le naufrage et le débarquement sur ce qui ressemble à une île où il rencontre un étrange Robinson qui l'initiera à une vie nouvelle dans laquelle, par cycles successifs, il fait différentes rencontres (le vieil homme, le loup, la lumière...) qui le mèneront progressivement vers une forme de symbiose avec la Nature-Mère.
Si The Last of Us réfère, cinématographiquement, à quelques grands noms du cinéma américain, il s'inscrit, à mon sens, bon gré mal gré, dans la tradition cinématographique des robinsonnades (citons en particulier les remarquables Aventures de Robinson Crusoé (1954) de Luis Bunuel et le Robinson Crusoé du soviétique Stanislav Govorukin (1973)) avec une reprise des différents motifs qui en constituent la structure narrative : naufrage, débarquement, rencontre Vendredi-Robinson, découverte de l'empreinte, etc.; toutefois, ces constituants sont très originalement déclinés, voire inversés dans le film : l'un des atouts du film c'est qu'il permet au spectateur de faire en toute liberté sa propre lecture de l'histoire, favorisé en cela par l'absence intégrale de dialogue, ce qui laisse du coup la voie libre à une bande -son remarquable ; ainsi l'on peut interpréter, en nous référant à la construction normative de la robinsonnade, le couple de personnages comme un couple initiatique où c'est Vendredi le naufragé qui rencontre Robinson et que c'est ce dernier qui l'initie aux mystères de la Nature, un peu à la manière du Vendredi de Tournier mais sans violence aucune.
Comme dans tout récit initiatique, le récit devient ainsi symbolique en procédant par cycles d'apprentissage où le végétal (les forêts du nord merveilleusement filmés par la caméra d'Amine Messaâdi) et l'animal (le loup-chacal dont le hurlement provoque l'excitation puis la quête du vieille homme, et que le naufragé finit par rencontrer endormi ou mort) jouent un rôle déterminant dans la quête. L'un des paliers élevés dans cette recherche est la rencontre de la lumière (qu'on peut prendre pour une représentation lunaire) dont on ne sait si elle suit ou si elle guide le naufragé. Le film , de ce point de vue, ménage un grand nombre de pistes de lecture et peut , de la sorte, intéresser différents publics, de l'intellectuel exigeant à l'enfant (je pense que The Last of Us est un film qui peut être projeté à un public de jeunes spectateurs et ce n'est pas là l'un de ses moindres mérites) en passant par le spectateur curieux de nouveautés.
"Akher Wahed Fina" est enfin un film thématiquement différent, même s'il s'articule sur les préoccupations des jeunes réalisateurs tunisiens ; il propose un produit de qualité, avec de très belles images, une bande-son intelligente, une narration originale; bref, il mérite qu'on s'y arrête et qu'on lui accorde une attention digne de sa valeur. C'est un film atypique et insolite, et c'est une excellente chose.
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