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Ce que les penseurs du monde musulman doivent apprendre de la polémique sur Marianne

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Dans une joute verbale et afin d'appuyer sa position anti-Burkina, M. Valls, premier ministre de la République Française a pris l'exemple d'un des symboles de la République française, à savoir Marianne représentée par une femme qui abandonne toute pudeur (en ayant le sein nu) pour une cause ô combien plus noble à savoir nourrir la jeune République du lait de la liberté.

Tout de suite après ce discours, des historiens sérieux et sans entrer dans la polémique (pour ou anti-burkini) sont montés au créneau pour dénoncer l'utilisation maladroite de la symbolique en instituant la vérité historique sur les raisons d'une telle représentation de Marianne.

Du coup, la rhétorique éloquente implacable a été un bel flop!

Ce genre d'épisode devra être pour nous musulmans, un exemple à suivre en ces temps troubles.

1. L'impératif du contre discours

La pensée extrémiste islamiste se base sur des déclarations et des interprétions particulières du socle législatif religieux aidées en cela par la place prépondérante de l'anecdotique dans la construction de ce socle. Devant l'absence de toute contradiction des savants et des ulémas, lesdites déclarations et interprétations deviennent des quasi-vérités qui trouvent leurs chemins dans les esprits de personnes déboussolées et dans une large mesure incultes sur le plan religieux.

C'est justement la responsabilité de l'intelligentsia progressiste musulmane de se lever debout pour dénoncer les tromperies, dissimulations et autres mesquineries et y apporter la version juste des faits et des interprétations qui en découlent.

Or force de constater qu'aujourd'hui "la contre-voix" est pratiquement inexistante et les quelques tentatives ici ou là sont soient inaudibles, soient soumises à des attaques tellement violentes qu'elles se terminent par les faire taire. Tel était le cas, par exemple, de M. Adnane Ibrahim, ce médecin et penseur palestinien qui depuis des années ne cesse de mettre la raison au cœur de la relation entre le musulman et sa religion en dénonçant la lecture unique, les dogmes fallacieux et les contre-vérités.

L'attaque virulente dont il a fait l'objet cet été suite à son programme télévisé "صحوة" ("Réveil") retransmis lors du mois de ramadan en est encore la preuve de la gravité de la situation. Adnan Ibrahim n'est encore qu'un nom sur la liste de ceux qui ont subi et continuent de subir les pressions allant jusqu'à la menace à leur intégrité physique.

2. Le discours, mais surtout la pédagogie

Toutefois, il faut aussi reconnaitre une chose. Parfois, le contre-discours est inaudible car nos penseurs manquent de pédagogie, non pas pour expliquer les concepts qui sont parfois complexes, mais dans la thérapie de choc qu'ils adoptent volontairement ou involontairement et qui peut heurter la sensibilité de ceux à qui ils sont supposés s'adresser.

La conséquence est que le fond est éludé et que le débat est perdu dans des questions subsidiaires ramenant les choses à leur point de départ, c'est-à-dire à la contre-vérité. Le savant perd ainsi toute crédibilité.

La cause se trouve parfois dans les convictions personnelles (y compris politiques) du penseur ou de l'historien ou bien dans la pression médiatique entourant le sujet. Ce sont des interférences dans une pensée qui se veut objective et portée sur le fond. Tel est le cas, par exemple de la polémique qu'on a vécu cet été sur l'apprentissage du Coran dans les écoles pendant les vacances scolaires.

La personnification du débat entre l'islamologue Naila Silini et l'ex ministre des affaires religieuses a éludé le fond d'un sujet qui méritait, à mon humble sens, un débat, non seulement sur la nécessité ou non de faire apprendre le Coran aux élèves, mais sur la question importante de la place que doit occuper la religion (en tant que matière) dans l'enseignement de nos enfants.

C'est pour cela que je préfère par exemple des penseurs tels que Hichem Jait ou Yousuf Seddik qui non seulement font preuve d'une rigueur scientifique irréprochable, mais aussi évitent tout ce qui peut être provoquant à la sensibilité des lecteurs.

Les corrections apportées par Mathilde Larrere hier sur son compte Twitter sur la représentation de Marianne n'ont pas été brouillées par ses positions politiques (imperceptibles au vu de ses tweets). Elle n'a pas cherché à participer à la polémique du burkini. Elle a plutôt fait son boulot d'historienne en redonnant à la vérité toute sa place. Les citoyens français apprécieront le discours de leur Premier ministre à l'aune de cette vérité.

C'est ce qui est demandé à nos historiens, théologiens, savants et ulémas.

Premièrement, la disponibilité à tout moment, de couper court aux chemins empruntés par les contre-vérités. C'est "la responsabilité sociale" du savant. Et secondement la pédagogie. Ça ne sert à rien de prôner un discours inaudible ou incompréhensible. Le savant ne doit pas se contenter de dire ce qu'il en est, mais il doit s'assurer que ses propos ont atteint leurs cibles.

La mission des savants du monde musulman est historique. On ne combat pas l'obscurantisme par les armes, mais par la lumière, mais celle-ci doit être claire et limpide.

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