C'est un documentaire. Ca pourrait être une fiction: Piyangke, un enfant de 8 ans, frère d'âme de Jean-Pierre Léaud, fait les 400 coups dans son village reculé du Bhoutan et attend comme le Bouddha la télévision.
C'est un documentaire de Thomas Balmès, beau comme du cinéma, récompensé au Festival de Sundance. Prix de la meilleure photographie. Pas de commentaires, peu de paroles. Pas la peine. Tout est dit, et plus encore dans les regards, les expressions, la tristesse et la gaieté qui passent sur le visage de l'enfant, filmé la plupart du temps dans l'obscurité, à la lumière d'une bougie.
Car à Laya, village perché à 4000 mètres, il n'y a pas d'électricité. Donc pas de télévision. Mais, elle va arriver! Le roi du Bhoutan l'a promis il y a dix ans. Il a aussi mis en garde ses sujets. "C'est le signe de notre modernisation et de notre développement. Mais, attention: la télévision et internet peuvent à la fois être dangereux et utiles pour notre jeunesse et notre pays. C'est pourquoi nous devons être vigilants et sélectifs."
Dix ans pour que des hommes atteignent le village de l'enfant, avec poteaux et câbles électriques. Avec l'émetteur pour recevoir les ondes hertziennes. La mère de Piyangke espère qu'avec l'électricité, les touristes pourront venir. Espère une vie meilleure. Le Bhoutan n'est-il pas le pays du Bonheur?
Pour l'heure, c'est la misère. Elle explique à Piyangke qu'elle ne peut pas le nourrir, qu'elle n'a pas d'argent pour le scolariser, qu'elle va devoir l'emmener au monastère. L'enfant ne voyait pas sa vie comme ça.
Ce regard, perdu, bouleversé et bouleversant, lorsque sa mère s'en va, le laissant là dans l'isolement d'une vie monastique. Discipline de fer qui ne convient guère à son caractère joueur et rêveur. Le lama, son nouvel instructeur s'inquiète de savoir si ses deux jeunes disciples vont rester. Tous les autres sont partis à la ville, là où la télévision est déjà arrivée. "Vous aussi vous voulez voir la télévision?", demande-t-il à Piyangke et son compagnon. "Oui, maître !" -"Croyez vous que la télévision va vous apporter le bonheur ?" -"Oui!", s'exclament avec ferveur les deux moinillons.
Au village, l'oncle de Piyangke dit qu'en vendant un yack, il pourra acheter la télévision. Les femmes exultent: "Il faudra prendre une grande télé pour qu'on puisse tous venir la voir chez toi! Les enfants aussi la regarderont et l'on pourra garder les yacks."
Parfois, l'enfant descend au village pour une caresse de sa mère et tirer à l'arc avec les autres enfants. Son oncle voit bien toute cette mélancolie, ce regard profond qui a perdu sa flamme. "Viens avec moi à la capitale, acheter la télé", lui dit-il pour lui redonner le sourire.
Trois jours de marche pour arriver dans un autre monde, un autre espace temps. Il découvre émerveillé la ronde incessante des voitures, les clochards, les magasins où il aimerait tout acheter, le mannequin qui n'est pas un vrai être humain, les poissons rouges qui sont vraiment des poissons.
Les lumières de la ville sont belles dans les yeux de Piyangke.
Au village, l'électricité est arrivée. Le monde a basculé. Dans le foyer, ils sont tous réunis, les femmes et les enfants et les hommes. Ils regardent cet écran, fascinant. Silencieux, sans bouger. Hypnotisés. On ne voit pas le poste, mais sa lumière bleutée éclairent tous les visages, les absorbent. Les dévorent. Dans dix ans, le Bhoutan sera-t-il toujours le pays du Bonheur?
C'est un documentaire de Thomas Balmès, beau comme du cinéma, récompensé au Festival de Sundance. Prix de la meilleure photographie. Pas de commentaires, peu de paroles. Pas la peine. Tout est dit, et plus encore dans les regards, les expressions, la tristesse et la gaieté qui passent sur le visage de l'enfant, filmé la plupart du temps dans l'obscurité, à la lumière d'une bougie.
Car à Laya, village perché à 4000 mètres, il n'y a pas d'électricité. Donc pas de télévision. Mais, elle va arriver! Le roi du Bhoutan l'a promis il y a dix ans. Il a aussi mis en garde ses sujets. "C'est le signe de notre modernisation et de notre développement. Mais, attention: la télévision et internet peuvent à la fois être dangereux et utiles pour notre jeunesse et notre pays. C'est pourquoi nous devons être vigilants et sélectifs."
Dix ans pour que des hommes atteignent le village de l'enfant, avec poteaux et câbles électriques. Avec l'émetteur pour recevoir les ondes hertziennes. La mère de Piyangke espère qu'avec l'électricité, les touristes pourront venir. Espère une vie meilleure. Le Bhoutan n'est-il pas le pays du Bonheur?
Pour l'heure, c'est la misère. Elle explique à Piyangke qu'elle ne peut pas le nourrir, qu'elle n'a pas d'argent pour le scolariser, qu'elle va devoir l'emmener au monastère. L'enfant ne voyait pas sa vie comme ça.
Ce regard, perdu, bouleversé et bouleversant, lorsque sa mère s'en va, le laissant là dans l'isolement d'une vie monastique. Discipline de fer qui ne convient guère à son caractère joueur et rêveur. Le lama, son nouvel instructeur s'inquiète de savoir si ses deux jeunes disciples vont rester. Tous les autres sont partis à la ville, là où la télévision est déjà arrivée. "Vous aussi vous voulez voir la télévision?", demande-t-il à Piyangke et son compagnon. "Oui, maître !" -"Croyez vous que la télévision va vous apporter le bonheur ?" -"Oui!", s'exclament avec ferveur les deux moinillons.
Au village, l'oncle de Piyangke dit qu'en vendant un yack, il pourra acheter la télévision. Les femmes exultent: "Il faudra prendre une grande télé pour qu'on puisse tous venir la voir chez toi! Les enfants aussi la regarderont et l'on pourra garder les yacks."
Parfois, l'enfant descend au village pour une caresse de sa mère et tirer à l'arc avec les autres enfants. Son oncle voit bien toute cette mélancolie, ce regard profond qui a perdu sa flamme. "Viens avec moi à la capitale, acheter la télé", lui dit-il pour lui redonner le sourire.
Trois jours de marche pour arriver dans un autre monde, un autre espace temps. Il découvre émerveillé la ronde incessante des voitures, les clochards, les magasins où il aimerait tout acheter, le mannequin qui n'est pas un vrai être humain, les poissons rouges qui sont vraiment des poissons.
Les lumières de la ville sont belles dans les yeux de Piyangke.
Au village, l'électricité est arrivée. Le monde a basculé. Dans le foyer, ils sont tous réunis, les femmes et les enfants et les hommes. Ils regardent cet écran, fascinant. Silencieux, sans bouger. Hypnotisés. On ne voit pas le poste, mais sa lumière bleutée éclairent tous les visages, les absorbent. Les dévorent. Dans dix ans, le Bhoutan sera-t-il toujours le pays du Bonheur?