Il y a quelques jours, une femme mûre de ma connaissance a voulu voir le lever du soleil sur la plage. A 5 heures du matin, elle est sortie en paréo dans les rues de Hammamet. Elle n'imaginait pas qu'en quelques minutes, elle allait susciter des réactions aussi... enthousiastes. Pas moins de quatre hommes l'ont abordée sur le trajet menant à plage, à coup de phrases d'approches pleines de sous-entendus et de gestes obscènes.
Cette scène, pourtant anodine, m'a profondément choquée. Elle m'a fait prendre conscience d'un fait que l'on considère comme anodin mais qui, pourtant traduit un profond malaise. En marchant seule dans la rue en Tunisie, que ce soit de nuit ou de jour, que l'on soit jeune, vieille, bien habillée ou en jogging, on suscite systématiquement les réactions plus ou moins respectueuses des hommes. C'est comme ça, c'est un fait tangible, dont toutes les femmes sont conscientes, et qu'aucune ne peut contredire. Quelle femme ou jeune fille peut dire "non, je n'ai jamais été harcelée dans la rue?".
Certes, le harcèlement de rue n'est pas propre à la Tunisie, ou aux pays arabes en général, sauf que la fréquence et l'intensité du harcèlement est, dans certains de ces endroits, plus forte.
Il suffit de voir le nombre de regards lubriques, coup de klaxons, sifflements, tentatives d'amorcer le dialogue, en voiture, les hommes qui s'arrêtent ou qui vous suivent, les insultes et mains baladeuses que l'on subit... quand on sort en robe. Je ne parle même pas de robe courte, décolletée ou moulante, je parle d'une robe simple en coton portée quand il fait chaud. Un vêtement fonctionnel, adapté à la température ambiante, qui, pourtant, devient un danger pour la fille qui le porte.
Comme si, en portant une robe, on suscitait ces commentaires. Comme si, en portant une robe, on voulait se faire rappeler toutes les dix secondes l'approbation de parfaits inconnus sur notre physique. Comme si, en portant une robe, on devenait un objet visuel en libre service qui devra être validé par tous les mâles aux alentours. Et si on a le malheur de répliquer, l'animal en rut qui nous a lancé à la figure un "cochonne" ou pire se retourne contre nous, et là vient la peur viscérale de l'agression physique. Cette peur, qu'on nous a inculquée dès notre plus jeune âge, qui nous apprend que si un homme nous harcèle dans la rue, on doit baisser la tête et se taire au risque de se faire frapper ou violer. Tout ça, parce qu'on nous apprend que nous sommes des jeunes filles sans défense.
Non, être harcelée dans la rue n'est pas un compliment. Chaque manifestation de ce harcèlement est un rappel à la peur de l'agression. Forcément, c'est la femme qui est en tort, elle, la tentatrice qui a le malheur de sortir jambes découvertes dans cette jungle qu'est la rue. C'est elle qui a tort quand elle répond, parce qu'elle devrait prendre un coup de klaxon comme un compliment. En marchant dans la rue, la jeune fille ou la femme ne se contente pas de se déplacer d'un point A à un point B, non, elle fait bien plus que ça, elle ose s'offrir au regard des hommes.
Imaginez un instant que, depuis votre puberté, vous ne puissiez jamais sortir dans la rue sans vous faire regarder et traiter comme un objet dont les autres voudraient disposer à leur guise et qui vous le manifestent. Petit à petit, de la façon la plus pernicieuse qui soit, s'installe la honte. La honte de quoi? D'être une femme, et d'avoir un corps de femme. A force de recevoir les regards vicieux, les mains baladeuses, les remarques vulgaires, on finit par comprendre que l'on porte malgré nous et tout ce qu'on pourrait y faire le déclencheur de ces réactions. On finit par se sentir sale, par être dégoûtée de ce corps qui nous fait "mériter" ça, sans que l'on ait rien demandé. La femme a honte d'avoir provoqué ces réactions en ayant été "une allumeuse" par sa simple existence alors que c'est l'homme agresseur qui devrait avoir honte d'être un pervers. C'est seulement dans ces conditions que je comprends la joie que ça doit être d'être en burqa. Elles, au moins, ne doivent pas subir tout ça.
Contre le harcèlement, la solution, ça serait donc de se mettre en burqa? Non, se couvrir suit un mécanisme d'inversion du problème. Se voiler ne résout pas le problème, au contraire, il soutient les harceleurs dans leur comportement puisqu'au lieu de leur apprendre que les femmes ne sont pas des animaux et qu'on n'appelle pas au rapport sexuel juste en marchant dans la rue, il pousse les femmes à se cacher, à prendre le moins de place possible. Au lieu d'apprendre à certains à se comporter correctement, dire à certaines de se couvrir entretient le mythe judéo-chrétien de la femme tentatrice, renforce les frustrations et donc renforce les agressions.
Pour s'informer sur le harcèlement de rue, déjà, voir le phénomène de l'extérieur permet de prendre conscience de l'ampleur de l'agression:
A New York
A Casablanca
On peut aussi prendre les choses avec humour et publier ses anecdotes, rire devant celles des autres sur Paye Ta Schnek.
On peut aussi s'informer sur le sujet en lisant l'excellent blog BD de Projet Crocodile
Cette scène, pourtant anodine, m'a profondément choquée. Elle m'a fait prendre conscience d'un fait que l'on considère comme anodin mais qui, pourtant traduit un profond malaise. En marchant seule dans la rue en Tunisie, que ce soit de nuit ou de jour, que l'on soit jeune, vieille, bien habillée ou en jogging, on suscite systématiquement les réactions plus ou moins respectueuses des hommes. C'est comme ça, c'est un fait tangible, dont toutes les femmes sont conscientes, et qu'aucune ne peut contredire. Quelle femme ou jeune fille peut dire "non, je n'ai jamais été harcelée dans la rue?".
Certes, le harcèlement de rue n'est pas propre à la Tunisie, ou aux pays arabes en général, sauf que la fréquence et l'intensité du harcèlement est, dans certains de ces endroits, plus forte.
Il suffit de voir le nombre de regards lubriques, coup de klaxons, sifflements, tentatives d'amorcer le dialogue, en voiture, les hommes qui s'arrêtent ou qui vous suivent, les insultes et mains baladeuses que l'on subit... quand on sort en robe. Je ne parle même pas de robe courte, décolletée ou moulante, je parle d'une robe simple en coton portée quand il fait chaud. Un vêtement fonctionnel, adapté à la température ambiante, qui, pourtant, devient un danger pour la fille qui le porte.
Comme si, en portant une robe, on suscitait ces commentaires. Comme si, en portant une robe, on voulait se faire rappeler toutes les dix secondes l'approbation de parfaits inconnus sur notre physique. Comme si, en portant une robe, on devenait un objet visuel en libre service qui devra être validé par tous les mâles aux alentours. Et si on a le malheur de répliquer, l'animal en rut qui nous a lancé à la figure un "cochonne" ou pire se retourne contre nous, et là vient la peur viscérale de l'agression physique. Cette peur, qu'on nous a inculquée dès notre plus jeune âge, qui nous apprend que si un homme nous harcèle dans la rue, on doit baisser la tête et se taire au risque de se faire frapper ou violer. Tout ça, parce qu'on nous apprend que nous sommes des jeunes filles sans défense.
Non, être harcelée dans la rue n'est pas un compliment. Chaque manifestation de ce harcèlement est un rappel à la peur de l'agression. Forcément, c'est la femme qui est en tort, elle, la tentatrice qui a le malheur de sortir jambes découvertes dans cette jungle qu'est la rue. C'est elle qui a tort quand elle répond, parce qu'elle devrait prendre un coup de klaxon comme un compliment. En marchant dans la rue, la jeune fille ou la femme ne se contente pas de se déplacer d'un point A à un point B, non, elle fait bien plus que ça, elle ose s'offrir au regard des hommes.
Imaginez un instant que, depuis votre puberté, vous ne puissiez jamais sortir dans la rue sans vous faire regarder et traiter comme un objet dont les autres voudraient disposer à leur guise et qui vous le manifestent. Petit à petit, de la façon la plus pernicieuse qui soit, s'installe la honte. La honte de quoi? D'être une femme, et d'avoir un corps de femme. A force de recevoir les regards vicieux, les mains baladeuses, les remarques vulgaires, on finit par comprendre que l'on porte malgré nous et tout ce qu'on pourrait y faire le déclencheur de ces réactions. On finit par se sentir sale, par être dégoûtée de ce corps qui nous fait "mériter" ça, sans que l'on ait rien demandé. La femme a honte d'avoir provoqué ces réactions en ayant été "une allumeuse" par sa simple existence alors que c'est l'homme agresseur qui devrait avoir honte d'être un pervers. C'est seulement dans ces conditions que je comprends la joie que ça doit être d'être en burqa. Elles, au moins, ne doivent pas subir tout ça.
Contre le harcèlement, la solution, ça serait donc de se mettre en burqa? Non, se couvrir suit un mécanisme d'inversion du problème. Se voiler ne résout pas le problème, au contraire, il soutient les harceleurs dans leur comportement puisqu'au lieu de leur apprendre que les femmes ne sont pas des animaux et qu'on n'appelle pas au rapport sexuel juste en marchant dans la rue, il pousse les femmes à se cacher, à prendre le moins de place possible. Au lieu d'apprendre à certains à se comporter correctement, dire à certaines de se couvrir entretient le mythe judéo-chrétien de la femme tentatrice, renforce les frustrations et donc renforce les agressions.
Pour s'informer sur le harcèlement de rue, déjà, voir le phénomène de l'extérieur permet de prendre conscience de l'ampleur de l'agression:
A New York
A Casablanca
On peut aussi prendre les choses avec humour et publier ses anecdotes, rire devant celles des autres sur Paye Ta Schnek.
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http://projetcrocodiles.tumblr.com/post/108245140083/jai-mis-des-petits-lapins-pour-ceux-qui-naiment
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